Est-ce que la définition de ma photo va être suffisante pour faire un grand tirage ? Suis-je coincé sur un format 10x15cm ou est-ce que je peux monter à du A4 ou encore plus ?
Si vous vous posez aussi la question ou si vous trouvez que PPP, PPI ou DPI sont des termes barbares, j’espère que cet article vous permettra d’y voir plus clair !
Je l’ai organisé avec la logique suivante :
- Qu’est-ce qu’une impression réussie
- Comment l’œil dit « bof j’aime pas »
- Quelques notions et principes (image, écran, imprimante)
- Comment s’en sortir
Si le côté technique ne vous intéresse pas, allez directement à la conclusion tout en bas de la page :)
Une impression réussie ?
Un petit exemple avant les maths. Regardez ces trois photos (source : Wikipédia) et dites moi celle qui vous semble la plus réussie :
Si vous n’êtes pas un particulièrement attiré par le pointillisme, je pense que vous trouvez la photo de gauche plus « belle ». La raison est simple : elle est « régulière », vous ne distinguez peu/pas les pixels qui composent la photo (pas d’effet « escalier »).
Votre œil vous dit qu’une photo est « bien imprimée » quand il n’arrive pas à distinguer les éléments (pixel / goutte d’encre) qui la composent.
« Comment savoir ce que l’œil arrive (ou pas) à voir ? » me demandez vous. Ça tombe bien, c’est l’objet du paragraphe qui vient.
La perception humaine pour les nuls
Le pouvoir de résolution désigne la capacité du couple œil/cerveau à distinguer les détails. Cela se comprend assez bien avec le dessin suivant, en imaginant que les deux points rouges représentent deux objets (« pixels ») d’une photo en train d’être observée :
L’angle α désigne l’angle qui sépare les deux points rouges, vu par l’œil. d est la distance entre l’œil et les points et h est la distance (verticale) entre les deux points.
Pour la même distance d, l’angle α diminue avec h : plus les deux points sont proches (plus h est petit), plus α est faible. Il existe une valeur de α à partir de laquelle un humain n’est plus capable de faire la différence entre ces points : c’est sa résolution.
Pour quelqu’un avec une acuité visuelle « normale », une valeur typique pour α est de 1″ (une seconde d’arc, 1/60ème de degré), soit un angle d’environ 0.0167° (degré). Impossible de faire la différence entre deux points s’il n’y a pas 0.0167° entre les deux !
Vous avez maintenant un début de réponse : pour qu’une photo soit bien imprimée, il faut que l’œil n’arrive pas à distinguer les éléments qui la composent. Autrement dit, l’angle entre deux éléments (pixel sur un écran / goutte d’encre sur du papier) doit être inférieur à la résolution de l’œil.
C’est une définition très théorique : d’autres facteurs comme le contraste ou la couleur jouent un rôle et tous les yeux sont différents. Nous allons donc garder cette base dans la suite.
Distance
Reprenons le schéma du paragraphe précédent :
Pour qu’une photo soit bien imprimée, on veut que l’angle α soit inférieur à 0.0167°.
Si l’œil se rapproche de la photo (d diminue) et qu’on regarde toujours deux « pixels » côte à côte (h ne change pas), l’angle α augmente, logique… C’est l’heure de ressortir ses cahiers de cours de maths à la page « théorème de Pythagore » pour mettre des chiffres la dessus.
La formule suivante donne la relation approchée entre les paramètres (triangle rectangle de grand côté d et de hauteur h/2 avec l’angle α petit – et exprimé en radian) :
En remplaçant α par sa valeur en radian, cette formule devient :
On en déduit la formule qui donne d en fonction de h :
et h en fonction de d :
Connaissant la distance h entre deux pixels (ou gouttes d’encre), la distance minimale d à laquelle je dois reculer pour ne plus faire la différence entre deux points se calcule directement.
Première application numérique :
Si h vaut 1 millimètre (deux traits sur une règle graduée par exemple), on trouve :
Si vous avez une acuité « normale », vous verrez toujours deux traits sur la règle si vous êtes à moins de 3.4 mètres.
Deuxième application numérique :
On peut aussi calculer la distance minimale entre deux points sur un écran d’ordinateur pour qu’on puisse les distinguer. Si vous êtes à 50 centimètres de votre écran, cela donne :
A 50 cm d’un écran, il faut que deux points (pixels) soient séparés de plus de 0.146 millimètre pour qu’on les voit.
Confort
Lorsque vous regardez un tableau, un film ou votre écran de PC, vous n’aimez généralement pas être trop près (vous devez alors tourner la tête pour tout voir) ou trop loin (vous ne voyez pas tous les détails). La pratique montre que notre zone de confort se situe entre 1 et 2 fois la diagonale de ce qu’on regarde. C’est une plage assez typique mais la encore, « ça dépend ». Par exemple nous avons tendance à nous rapprocher de l’image quand elle est prise avec un grand angle (« fish-eye ») et à nous en éloigner quand la focale est plus grande.
Cette relation entre la distance de confort et la diagonale de l’image revient à définir le champ angulaire dans lequel l’image doit tenir. En effet, se placer toujours à une distance d’observation égale à la diagonale de l’image observée revient à utiliser un champ angulaire de 50°. En utilisant le pouvoir de résolution de l’œil, on peut calculer le nombre de pixels nécessaires dans la diagonale de l’image pour en théorie « tromper » l’œil. L’application numérique est simple, il suffit de diviser le champ angulaire à couvrir par l’angle maximum entre 2 pixels (1/60°) : il faut donc 3000 pixels dans la diagonale, qu’elle que soit la taille de l’image qu’on regarde. En fonction des formats, cela revient à une résolution théorique d’environ uniquement 4 millions de pixels (4 MP, voir plus bas) ! Sur ce seul critère, un appareil photo d’une définition de 4 MP permettrait en théorie d’imprimer une photo de plusieurs mètres de large. Ce n’est malheureusement pas réaliste : votre photo sera probablement terne, sans contraste ni détail.
Quelques notions et principes
Un angle et des mètres, c’est sympa, mais mon appareil photo, il me donne des pixels, et mon imprimante, c’est des DPI. Qu’est-ce que c’est et qu’est-ce que j’en fait ?
La définition d’une image numérique
Commençons par le plus simple : la définition d’une image numérique. Il s’agit du nombre de pixels qui composent cette image, quelle que soit son origine (appareil photo, scanner,…). Un pixel représente un petit carré d’une couleur donnée. L’information sur la couleur consiste généralement en trois valeurs, désignant la proportion de rouge, de vert et de bleu (plus d’infos sur Wikipédia).
On peut voir que le smiley ci-dessus est un carré de 24*24 pixels et qu’une couleur est bien représentée par la proportion des couleurs primaires. Ce smiley a donc une définition de 24*24 pixels.
La définition d’une image numérique est donc sa dimension en pixels (largeur*hauteur).
Un appareil photo numérique (par exemple le Canon EOS 7D) donne des photos de définition maximale 5184 × 3456 pixels (nombre total de pixels de 17 915 904 soit environ 18 millions de pixels – ou 18 mégapixels – 18 MP).
La résolution : PPP, PPI et DPI
Le terme « résolution » définit un nombre d’informations (pixels ou gouttes d’encre) par unité de longueur. Ainsi, la « résolution » est uniquement associée à une valeur de « définition » lorsqu’une image quitte son support numérique (carte mémoire, disque dur,…) pour être affichée sur un support (affichage sur un écran, impression).
Il existe différents termes pour parler de résolution. PPP signifie « Points Par Pouce », PPI « Point Per Inch » et DPI veut dire « Dot Per Inch ». Ces trois termes désignent un nombre de pixels ou gouttes d’encre par pouce, c’est-à-dire pour une longueur de 2.54 cm (un pouce – « Inch » en anglais – vaut 2.54 cm). Les termes PPP, PPI et DPI désignent donc un type de résolution, mais sont utilisés dans des contextes différents, et donc avec des significations différentes.
Pour un écran
Pour un écran, en plus de sa définition en pixel, on parle souvent sa résolution PPP. Il s’agit du nombre de Pixels Par Pouce. Pour différents écrans avec la même définition (le même nombre de pixels), le nombre de pixels par pouce (la résolution = la densité de pixels) varie en fonction de la taille de l’écran.
Le PPP par l’exemple
Prenons deux écrans d’une définition classique de 1920*1080 au format 16/9 avec deux diagonales différentes (22 et 24 pouces) :
- La définition 1920*1080 désigne le nombre de pixel dans la largeur (1920) et la hauteur (1080) de l’écran.
- Le format 16/9 désigne le rapport entre la largeur et la hauteur. Ici, la fraction 16/9 (16 divisé par 9) vaut approximativement 1.78, cela veut dire que la largeur de l’écran est 1.78 fois plus grande que sa hauteur.
- La diagonale désigne la longueur de la diagonale de l’écran.
Pour associer un nombre de pixels à une distance, il faut déjà trouver la relation qui donne hauteur et largeur en fonction de la diagonale (désolé, encore des maths). Avec un format 16/9, L = 16/9*h et d’après Pythagore, d² = L²+h². On a donc :
Ce qui donne la relation entre d et h :
Pour une diagonale de 22 pouces, d = 22*2.54 = 55.88 cm, donc h = 27.4 cm et L = 48.7 cm.
- Sur la hauteur, 1080 pixels tiennent sur 27.4 cm, donc sur 10.79 pouces. On trouve un PPP de 1080/10.79 = 100.13
- Sur la largeur, 1920 pixels tiennent sur 48.7 cm, donc sur 19.17 pouces. On trouve un PPP de 1920/19.17 = 100.14
Pour une diagonale de 24 pouces, même exercice. d = 60.96 cm, h = 29.9 cm et L = 53.2 cm.
- Sur la hauteur, on trouve un PPP de 1080/11.77 = 91.79
- Sur la largeur, on trouve un PPP de 1920/20.93 = 91.75
Pour voir un peu mieux ce que ça donne, voici un schéma peut-être plus clair que quelques formules mathématiques :
Ainsi, un écran plus petit, avec la même définition, a des pixels plus proches les uns des autres, ce qui se traduit par un PPP (une résolution) plus grand.
Comment est affichée une photo sur un écran ?
On l’a vu, une image est une grille de pixels, chacun avec une couleur différente, paramétrée par les proportions entre rouge, bleu et vert. Pour la majorité des écrans, les couleurs sont obtenues de manière additive en combinant 3 sous-pixels rouge bleu et vert. Sur une base « noire », chacun des sous-pixels envoie « sa » couleur (rouge, bleu ou vert) avec une intensité différente. Ces trois couleurs se « combinent » alors au niveau de l’œil pour rendre la couleur désirée.
Calculons maintenant la distance entre deux pixels (= groupe de 3 sous-pixels) pour un écran 24″. Il y a 1920 pixels sur 53.2 cm, il y a donc environ 0.0277 cm (= 0.28 mm) entre chaque pixel.
Or, à 50 cm d’un écran, il faut que deux pixels soient séparés de plus de 0.146 millimètre pour qu’on puisse les distinguer (voir le calcul plus haut). On devrait donc voir les pixels, ce qui n’est pas le cas pour un œil avec des performances « normale ». A cause des sous-pixels, la véritable distance entre deux sources de lumières (deux sous-pixels) n’est pas de 0.28 mm mais 0.093 mm, les rendant effectivement indiscernable à 50 cm, ouf !
Reste maintenant à comprendre l’impression.
Pour une imprimante jet d’encre
Une imprimante fonctionne de la même manière qu’un écran, en combinant des gouttes de couleurs différentes pour faire croire à l’œil qu’il voit une couleur unique. En simplifiant, le papier est à la base blanc : cela diffère de l’écran qui lui est noir. L’imprimante ne peut donc pas utiliser le principe d’une combinaison « additive » des couleurs et se base sur un principe soustractif… et donc avec des couleurs différentes, généralement cyan, magenta et jaune.
Pour restituer la couleur désirée, l’imprimante va projeter des gouttes de différentes couleurs sur le papier. Une performance de l’imprimante jet d’encre est donc sa capacité à faire des petites gouttes et à les serrer les plus possibles.
DPI et PPP/PPI pour une imprimante
La capacité d’une imprimante à « serrer des petites gouttes » est exprimée en DPI et est exprimée dans un format du type xxxx*yyyy par les fabricants, avec des valeurs typiques de 9600*2400. Ces deux chiffres représentent le nombre de gouttes d’encre que l’imprimante peut déposer par pouce, selon les deux dimensions. Le premier chiffre correspond au nombre de gouttes selon la direction de déplacement de la tête d’impression (généralement dans la largeur de la feuille), le second dans l’autre sens. Il est plus facile de maîtriser la position de la tête d’impression que celle du papier, c’est pour ça que le premier chiffre est toujours plus grand.
Bref, de ces deux valeurs, c’est la plus faible qui donne la qualité maximale que pourra atteindre l’imprimante pour une photo. Mais attention, DPI (gouttes d’encres par pouce) ne se traduit pas directement en PPP ou PPI (pixels par pouce) !
De la même manière que l’écran, l’imprimante ne peut pas restituer un pixel de la photo en une unique goutte d’encre, il lui faut en combiner plusieurs. C’est le nombre de gouttes d’encre nécessaires à l’imprimante pour restituer un pixel d’une image qui permet de trouver la relation entre DPI « imprimante » et PPP/PPI « image numérique ».
Si vous voulez aussi comprendre la notion de LPI (Lignes Per Inch), je vous conseille d’aller faire un tour sur ce site : trame-aléatoire.
L’imprimante triche !
Comme si ce n’était pas assez compliqué, les spécialistes de l’impression ont développés différents processus pour améliorer la perception humaine d’une photo imprimée, en particulier le « Dithering » (tramage) et le « Halftoning » (demi-teinte). Voici une illustration de Matt Grum tirée du site Photo StackExchange :
Sans rentrer dans les détails, ces deux techniques permettent de faire croire à l’œil que l’imprimante est meilleure qu’elle ne l’est. En apportant un caractère aléatoire dans la position et la taille des gouttes d’encre (procédé jalousement gardé par chaque fabricant), l’imprimante nous berne et nous pensons voir davantage de détails et des couleurs plus variées.
Simplification
Les techniques d’impression étant complexes et variées, nous allons prendre comme hypothèse par la suite qu’un pixel d’une photo va être fidèlement reproduit quelle que soit la méthode d’impression. Nous ignorerons donc les performances d’impression de l’imprimante. C’est un peu pessimiste : une imprimante jet d’encre va déposer plusieurs gouttes pour représenter un pixel, donc même si en théorie votre photo n’a pas une définition assez grande pour être imprimée, vous avez des chances de ne pas le voir.
Conclusion
Comme vous avez pu le constater, il est difficile de trouver une règle « mathématique » pour définir la définition « idéale » que doit avoir une photo pour être imprimée dans une taille donnée.
Il est cependant possible d’utiliser quelques « règles » connues des photographes et un petit outil bien pratique d’aide graphique.
La photo d’album (type 10*15 cm)
Lors que vous regardez une photo classique, à une distance d’environ 25 cm, la capacité d’impression recommandée est de 300 PPI. Ainsi, il suffit de diviser les dimensions en pixels de l’image par 300 pour avoir la dimension en pouce de l’impression.
Avec une image de 2000*3000 pixels (6 mégapixels), il sera donc possible d’imprimer une image de 6.7 par 10 pouces, soit environ 17 par 24 centimètres (1 pouce = 2.54 cm).
L’affiche ou le poster (type 60*90 cm)
Dans le cas d’affiche ou de poster, vous serez plus éloignés, probablement à quelques mètres et deux gouttes d’encres pourront être plus espacées sur le papier sans que vous puissiez le percevoir. Ainsi, il vous sera possible d’imprimer dans de plus grandes dimensions.
Ainsi, une résolution de 150 PPI est généralement adaptée pour une image de 60*90 cm (24*36 pouces environ). Avec cette qualité, il vous faudra ainsi une photo d’une définition de 3600 (24*150) par 5400 (36*150) pixels (soit environ 19 Megapixels).
Encore plus grand
Les imprimeurs que j’ai pu consulter recommendent une résolution d’au moins 130 à 150 PPI pour les tirages de grandes dimensions. Je ne peux que vous conseiller de vous rapprocher de votre imprimeur pour ce type de tirage, dont le prix laisse assez peu de place à l’erreur.
Aide graphique
Le graphique interactif qui suit donne la définition nécessaire en fonction de la taille et du format pour différentes résolutions (300, 200 et 100 DPI). Il vous donne aussi le DPI équivalent avec 3000 pixels dans la diagonales (300 DPI équivalent si vous observez l’image à une distance d’une fois sa diagonale). Il vous permet ainsi d’avoir une idée de la définition nécessaire pour votre projet.
Les échelles sont données en centimètres.
Faites des tests !
Les valeurs ci-dessus ne sont présentées qu’à titre indicatif. N’hésitez pas à faire vos propres tests, de nombreux autres facteurs entrant en jeu, en particulier le type de photo (sombre/lumineuse, contrastée ou non), le papier que vous choisirez ou encore l’éclairage sous lequel vos tirages seront dévoilés.
J’espère ne pas être rentré dans des sujets trop ennuyeux et que vous avez apprécié la lecture de cet article. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques et suggestions :)
Bonsoir, vos explications sont très claires.
Merci